Trouble panique : comprendre et agir

5/5/2022
entraide santé mentale
Maëva
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Anxiété, angoisse, panique, nervosité, peur… Autant de mots qui convoquent un champ lexical faisant échos à des perceptions et sensations universelles. Pourtant, il reste souvent difficile de mettre en mots ce que nous ressentons ou encore de savoir si ces phénomènes sont normaux ou envahissants. Ce que nous te proposons dans cet article, c’est de faire le tour de ces notions entremêlées en les définissant avant d’insister sur les ressorts du trouble panique et de la crise de panique, tout en t’apportant des clefs pour apaiser ce type de situations.

L’anxiété : la peur sans raison

Souffrir d’anxiété, c’est avant tout anticiper quelque chose que nous percevons comme menaçant.

« Quelque chose » car fréquemment, l’objet de cette anticipation douloureuse est peu défini, voire extrêmement vague ou inconnu de la personne concernée.

Ainsi, l’anxiété implique la formulation excessive d’inquiétudes à propos du futur. Si elle est nécessairement désagréable, elle est considérée comme pathologique lorsqu’elle se chronicise, auquel cas elle générera une gêne symptomatique dans le quotidien qui repose sur un état durable d’hypervigilance.

Cette dernière s’articule autour de manifestations physiques (palpitations cardiaques, désordres digestifs, troubles du sommeil notamment insomnies d’endormissement), cognitives (ruminations, troubles de la concentration) et émotionnelles (peur, irritabilité, labilité des affects).

D’un point de vue externe, il est difficile de coller l’étiquette de « normal » ou de « pathologique » aux manifestations anxieuses d’un.e autre : il appartient à la personne qui vit l’anxiété de pouvoir dire si ce sentiment inconfortable génère une altération fonctionnelle chez elle.

Nous avons par ailleurs écrit un article sur les symptômes de l'anxiété ainsi qu'un autre sur les symptômes de l'anxiété dont on ne parle pas assez si tu veux creuser le sujet.

Définition et exemples de distorsions cognitives en lien avec l'anxiété

Définition des distorsions cognitives

Bien souvent, l’anxiété est alimentée par nos distorsions cognitives.

Nous nous laissons tous piéger par ces dernières à plus ou moins haute dose. Elles recouvrent le processus par lequel nos schémas de pensée, façonné par notre histoire développementale, nous poussent à percevoir et interpréter des informations sur nous, les autres et le monde d’une manière qui n’est pas fidèle à la réalité.

Elles jouent un rôle significatif dans le maintien et la rigidification de nos comportements car elles émanent de nos schémas de croyance et les nourrissent rétro-activement.

Schématiquement, il s’agit de cette lunette que nous portons en permanence et au travers desquelles nous retenons les stimuli de notre environnement et leur donnons un sens qui est congruent à nos croyances.

Quelques exemples de distorsions cognitives propres à l’anxiété

Au premier plan chez les anxieux ? L’anticipation négative ou le catastrophisme qui désigne la conviction générale que nos projets vont échouer et peut mener à une forme de résignation et à une dégradation de l’estime de soi.

Un autre biais cognitif est l’abstraction sélective qui module notre attention et notre rétention des informations de façon à se centrer uniquement sur les aspects négatifs de nos interactions avec le monde : « mon intervention en réunion était un désastre car l’un de mes collègues a formulé une critique », « ma soiréed’anniversaire était nulle parce que telle personne n’est pasvenue ».

Ces raisonnements entretiennent un  lien étroit avec la disqualification du positif (« elle me dit que je suis drôle car elle est gentille ») qui favorise la mésestime de soi et le pessimisme dans les syndromes anxio-dépressifs.

Nous pourrions également citer la pensée dichotomique (« je ne suis pas major de promo donc j’ai raté mon année »), l’inférence arbitraire (« ces passants rigolent car ils se moquent de moi ») ou la personnalisation  (« il est de mauvaise humeur à cause de quelque chose que j’ai fait »), pour ne citer qu’elles parmi les principales distorsions cognitives qui participent à l’anxiété.

Ainsi, un premier travail de psycho-éducation peut être opéré à l’aide d’un thérapeute ou d’un groupe d’entre-aide afin d’apprendre à reconnaître ces biais et la forme qu’ils prennent dans notre dialectique personnelle.

Ensuite, il sera possible d’apprendre à les repérer soi-même dans le quotidien afin de s’en méfier et de confronter les conclusions tirées à d’autres hypothèses explicatives : quelles est la probabilité qu’il soit de mauvaise humeur à cause de moi ? A cause des embouteillages ? A cause de sa vie personnelle ? A cause de son sommeil ? En thérapie cognitivo-comportementale, on parle plus généralement de questionnement socratique et de restructuration cognitive pour désigner ces exercices de pensées.

L’angoisse : conditionnement et peur

L’angoisse s’appuie également sur le volet cognitivo-émotionnel exploré dans le paragraphe sur l’anxiété mais implique une association de ces contenus affectifs et ruminations à une réponse physiologique.

Finalement, nous pourrions considérer l’anxiété comme une forme subaiguë (intermédiaire entre l'état chronique et l'état aiguë) et plus durable d’angoisse.

Ainsi, l’angoisse est une sensation universelle qui s’accompagne de manifestations somatiques à l’instar d’une pression thoracique pouvant créer une gène respiratoire, de palpitations cardiaques ponctuelles, de douleurs (maux d’estomac notamment) et de la fameuse boule dans le ventre ou boule dans la gorge.

Dans le cas où elle devient récurrente, il convient d’éliminer toute cause organique pouvant être à l’origine de ces désagréments à l’aide d’un examen médical somatique avant de procéder à sa prise en charge psychothérapeutique et éventuellement médicamenteuse.

Cette réaction peut être appréhendée via un modèle purement cognitif qui repose sur une sur-évaluation du danger réel et du sentiment de compétence perçu pour y faire face : « Je ne vais jamais y arriver » , « J’en suis incapable », « Ce n’est pas moi qui vais finir mais cette tâche qui va me finir ».

Elle peut également être lue selon une grille comportementale, celle du conditionnement, que l’on retrouve classiquement dans les troubles phobiques.

Cela consiste à penser qu’un jour, alors que j’étais en présence d’un stimulus neutre (salle de classe, transports en commun, ascenseur), j’ai ressenti une peur intense du fait d’un autre stimulus dit inconditionnel (annonce d’une mauvaise nouvelle, sensation de malaise, accident) et qu’à ce moment, un apprentissage s’est opéré de façon à ce que j’associe désormais ce stimulus neutre à ma réponse conditionnelle qui a été la peur.

Et si on t’a peut-être toujours répété que l’apprentissage était le fruit de la répétition, cela est faux dans un contexte intense émotionnellement.

Le fait est que le conditionnement opérant est délétère chez les personnes angoissées car il les pousse à associer les premiers signes d’angoisse à l’épisode d’angoisse massive qui leur succède.

Ce processus est d’autant plus impactant lorsque l’angoisse s’accompagne d’attaques de panique.

Les attaques de paniques : les définir et les reconnaître

Une sensation de mort imminente

Si tu as déjà souffert d’une attaque de panique, alors tu sais à quel point cela est dur à décrire.

Nous pourrions tenter de la définir comme une manifestation paroxystique de l’angoisse qui prend la forme d’une crise d’installation soudaine (inférieure à 10 minutes).

Elle est caractérisée par une impression de mort imminente (dont les déterminants sont à la fois psychogènes et somatogènes), d’une sensation d’effroi indescriptible et due à l’appréhension d’une menace grave.

Une impression de devenir fou

Ceux qui connaissent une attaque de panique pour la première fois rapportent fréquemment l’impression de devenir fous.

Ce sentiment émane en partie du sentiment de dépersonnalisation, symptôme phare de ces moments peu sympathiques. En psychiatrie, il existe des définitions précises de la dépersonnalisation, mais elles sont parfois un peu hermétiques.

Le mieux, c’est de s’en remettre aux personnes qui l’ont vécue et à la façon dont elles le rapportent.

Ainsi, le vécu de dépersonnalisation au cours d’une crise d’angoisse recouvre une sensation de perte de contrôle, de dissociation de son propre corps, de perte d’unité interne, comme si tout à coup le monde s’était décalé d’un degré et avait pris un aspect étrange, comme dans un film.

Ces derniers détails ont davantage attrait à la déréalisation qui survient par ailleurs fréquemment en même temps que la dépersonnalisation.

Les symptômes d'une attaque de panique d'après le DSM

Cependant, l’impression de mort imminente décrite dans les crises de panique ne provient pas seulement de ce registre d’altération du rapport à soi (dépersonnalisation) et à la réalité (déréalisation), mais aussi et surtout des manifestations physiques qui lui sont associées.

Prenons deux types de loupes : l’observation externe et le ressenti interne.

Vue de l’extérieur, une personne traversant une attaque de panique présentera une état d’agitation ou bien de sidération stuporeuse (grande immobilité avec aréaction aux stimuli de l’environnement, beaucoup plus rare).

Quant aux vécus associés à l’attaque de panique, le Manuel Statistique des Troubles Mentaux (DSM, 5eme édition, American Psychiatric Association) stipule qu’il est ajusté de parler d’attaque de panique lorsqu’au moins 4 des sensations suivantes apparaissent brutalement :

  • palpitations ou accélération du rythme cardiaque (tachycardie)
  • transpiration
  • tremblements ou secousses musculaires
  • sensation de « souffle coupé » ou impression d’étouffement
  • sensation d’étranglement
  • douleur ou gêne dans le thorax
  • nausée ou gêne dans l’abdomen
  • sensation de vertige, d’instabilité, d’évanouissement
  • frissons ou bouffées de chaleur
  • paresthésies (picotements, fourmillements, …) 
  • peur de perdre le contrôle ou de devenir fou
  • peur de mourir
  • déréalisation ou dépersonnalisation

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Comment maîtriser une attaque de panique ?

Il n’y a malheureusement pas de solution magique pour calmer instantanément une crise d'angoisse : l’intensité de la peur ressentie est si démesurée qu’il est impossible de la raisonner.

En revanche, les clefs à adopter dans ce type de situation sont davantage orientées vers la possibilité de réguler le système nerveux autonome qui est en état d’hyperactivation.

Voici quelques exemples de techniques pour se faire.

S'ancrer dans son environnement

Il est par exemple possible de compter tous les éléments avec une caractéristique définie qui t’entourent.

Typiquement : « OK, je compte tous les objets bleus dans la pièce ».

Cela va permettre de combattre la déréalisation et de remobiliser correctement le traitement visuo-perceptif des informations.

La respiration carrée

Cette technique de respiration consiste à enchaîner des cycles respiratoires de durée égale et structurés comme suit :

inspiration – pause – expiration – pause.

Le modèle le plus souvent retenu consiste à inspirer sur 4 secondes, bloquer sa respiration pendant 4 secondes, expirer pendant 4 secondes et bloquer de nouveau sa respiration pendant 4 secondes avant d’inspirer de nouveau.

Cet exercice peut être facilité par certaines applications smartphone, par l’aide d’un tiers ou par le fait de passer ses doigts contre un objet carré (un magnet, un porte-clef, …).

Il permet à la fois d’interrompre l’hyperventilation, de réguler le rythme cardiaque et de réduire les sensations désagréables de picotements et fourmillements en remettant en circulation dans le sang une quantité suffisante de dioxyde de carbone et de bicarbonates.

Il est également possible de se forcer à respirer dans un sac pour pouvoir ré-inspirer le dioxyde de carbone dès le début de la crise, mais il est impératif que celui-ci soit en papier ou en kraft.

Autres techniques d'ancrage

Enfin, il est possible de faire usage d’autres « grounding techniques » (techniques d’ancrage).

Si tu commences tout juste à sentir l’attaque de panique monter et que tu es assis, tu peux poser tes pieds à plats sur le sol et te concentrer sur la sensation du plancher contre toi

Néanmoins, si la crise est déjà avancée, et que tu as d’importants vertiges, il peut être plus confortable et prudent de se mettre en position couchée.

Dans tous les cas, tu peux combattre la fameuse « boule dans le ventre » et la sensation de jambes qui s’envolent en contractant alternativement les muscles abdominaux et ceux de tes membres inférieurs.

Le trouble panique : quand l’attaque de panique se complique

Définition du trouble panique

Si nous avons pour le moment raisonné en terme d’attaque de panique, le fait est que ce type de phénomène est supposé être extrêmement ponctuel et survenir dans un contexte qui le justifie.

Or, lorsque ces manifestations se multiplient au point de perturber le fonctionnement de la personne qui les connaît, il est préférable de parler de trouble panique.

Ce dernier est caractérisé par la multiplicité des attaques de panique (le trouble panique est discuté dès lors qu’il y a eu 4 attaques au cours des 4 dernières semaines) ainsi qu’une forme d’anxiété anticipatoire à l’idée qu’une crise puisse survenir et / ou l’adoption de comportements inadaptés en réaction aux attaques (évitement, conduites contra-phobiques, conduites addictives, dépendance relationnelle, …).

Si tu penses souffrir d'un trouble panique, tu peux jetter un coup d'oeil sur le test du trouble panique dans notre article dédié.

Le traitement du trouble panique

Le trouble panique peut survenir dans des contextes et histoires de vie variés. Ainsi, il peut donner lieu à des indications thérapeutiques différentes mais requiert toujours un accompagnement psychologique.

Dans le cas où il est associé à des composantes anxieuses de la personnalité, une psychothérapie d’inspiration psychodynamique (en lien avec les concepts psychanalytiques) peut être bénéfique en ce qu’elle permet d’explorer les premières traces mnésiques et expérientielles de cette angoisse et de leur apporter sens et symbolisation.

Il est également possible de choisir un accompagnement de registre cognitivo-comportemental, les techniques d’exposition, de désensibilisation, de restructuration cognitive (amorcée plus haut) ou encore de pleine conscience ayant largement fourni leurs preuves dans le traitement des troubles anxieux et panique.

Parfois, le trouble panique survient à la suite d’un événement potentiellement traumatique et s’inscrit ainsi dans un état de stress post-traumatique. La prise en charge globale de la symptomatologie post-traumatique, avec possibilité d’une thérapie EMDR sera alors bénéfique pour le trouble.

Dans tous les cas, il est possible de songer à une prise en charge pluridisciplinaire, où la psychothérapie est complétée par un accompagnement sophrologique, la pratique d’une activité physique adaptée (aide à la gestion de la respiration avec un APA formé, pratique du yoga, …) et surtout un suivi psychiatrique dans le cadre duquel pourra être prescrit un traitement médicamenteux.

En effet, la réduction des symptômes du trouble panique peut nécessiter l’instauration d’un traitement. Ce dernier peut être :

  • de nature préventive, auquel cas on parle de traitement de fond (antidépresseurs, de la famille des inhibiteurs de la recapture sérotoninergique, des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, ou des tricycliques)
  • de nature curative : ce sont les « si besoin » qui visent à réduire l’angoisse qui succède à l’attaque de panique et qui sont des anxiolytiques benzodiazépiniques (diazépam, oxazépam, lorazépam, alprazolam, …) ou non-benzodiazépiniques (molécules initialement anti-histaminiques comme l’hydroxyzine, béta-bloquants pour désamorcer l’hyperactivitation du système nerveux autonome, …)

Conclusion

En somme, tu l’auras compris, les premières clés dont tu peux te saisir si tu souffres de l’une de ces problématiques sont l’identification de son retentissement dans ton quotidien, le fait de te tourner vers un groupe d'entraide ou des personnes de ton entourage qui sont à même d’écouter ce que tu vis et de te soutenir et la consultation d’un.e professionnel.le de santé mentale.

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